mon expérience
J’étais une adolescente quand mes
parents m’ont offert une Tony rouge. C’est une mobylette plus ancienne que les
scooters. La mienne se démarrait avec une clé, certains modèles démarraient
avec des pédales.
Maudit que j’aimais ma Tony! Couchée
par devant pour contrer le vent je pouvais atteindre 70 km. Je trippais.
Surtout que venant de la campagne éloignée de tout, pas d’autobus, pas assez âgée
pour une voiture, ma Tony me donnait la liberté d’aller ou je voulais. Je me
souviens la première fois ou un motard m’a salué. Je suis rentrée chez moi, en
disant à ma mère qu’un gars sur une grosse moto m’avait fait signe à moi, la
petite en Tony! Et chaque fois que je croisais un motard il me saluait.
J’adorais ça! Ce signe de respect, d’acceptation
dans un groupe qui à l’époque ne faisait pas de différence, l’important étant qu’on
conduit un deux roues. Petit, grand, sport, et même mobylette! On se saluait.
Je conduisais le tracteur de ferme
depuis l’âge de 9 ou 10 ans. On avait des quatre roues sur la terre qu’évidemment
je maîtrisais très bien. En grandissant je caressais le rêve d’avoir ma moto un
jour. Tous mes agendas étaient parsemés de photos découpées dans des revues, de
moto ninja, sport, de couleurs vives! Je voulais rouler vite.
Puis, c’est un bateau qui fit son
entré dans ma vie nouvellement adulte. Il n’y a pas d’endroit plus merveilleux
qu’être sur l’eau. Au début, on se saluait entre nous. Mais avec le temps, ils
ont perdu ce langage, ces nouveaux jeunes capitaines. Je retrouvais ce respect que j’avais goutté sur
ma Tony. Je l’ai aussi retrouvé quand nous avions une jeep. Un clan mystérieux
dont personne ne parle mais qui se salue en se croisant. Encore ce sentiment d’appartenance
à un groupe.
Et je me suis retrouvée assise
backseat sur une moto il y a un an. J’ai retrouvé mon amour de jeunesse que j’avais
délaissé au fil des années. Ce sentiment de liberté que je poursuis dans le tout
de la vie. Que ce soit sur l’eau, couchée au sol à regarder le ciel, ou même le
fait d’avoir la liberté de choisir ce que je vais manger… Bref. Me voilà avec l’idée
de posséder ma propre moto. Pas question de rester assise derrière quand je
peux être libre de conduire.
Je m’inscris donc pour obtenir mon
permis de classe 6A. Mon amoureux ayant son permis, me donne conseils et me
dirige dans le processus. Étape numéro un : étudier le livre conduire une moto pour ensuite passer l’examen
théorique a la saaq. Ce que je fais. Mais je ne saisis pas la théorie, je ne
fais que lire.
J’échoue la première fois. J’étais
bien trop confiante! Bah! C’est facile, c’est juste un test avec des questions
sur la conduite, je conduis depuis tellement longtemps! À la dernière question
il ne me reste qu’une seule erreur pour échouer. À cet instant, j’ai chaud en
esti! Je me mets à trembler, je lis, lis, relis et relis… Je ne me fais pas
assez confiance, la question est trop conne! La réponse est surement un piège…
que je tombe dedans à pieds joints… échec.
J’ai pleuré dans la voiture. Voyons
donc! Je n’échoue jamais moi! C’est un coup dur. Je prends un autre
rendez-vous. Un mois plus tard! C’est la règle. La question m’a hantée
pendant quelques jours. Puis je me suis ressaisis! Go Go! Étudie! Je relis le
livre, je ne comprends encore pas tout, mais je relis. Entre temps je m’inscris
au cours théorique obligatoire, ou le gars passe ledit livre conduire une moto avec le groupe.
Diapositives, histoires, vidéos. Je comprends un peu plus la théorie du livre.
Arrive le jour examen numéro 2. Je suis stressée au max! J’ai étudié plus que la
première fois, ça devrait aller. Je prends mon temps. Je lis, relis, relis. La dernière
question arrive. Esti! Il ne me reste qu’une seule erreur avant d’échouer. Je n’ai
pas souvenir avoir lu quoique ce soit en rapport avec la question! De kossé!??
Je panique! Je lève ma main, au moins je vais gagner du temps. Je vais lui
demander de m’expliquer le mot que j’ai jamais vu. Pis je vais lire sur son
visage le langage non verbal qu’il fera et j’aurai ma réponse. Pantoute!! Ma
main devient engourdie, personne ne vient. Alors je prends une grande
inspiration et je fais un choix. Bam! Echec! C’était un piège, je n’avais
jamais vu cette théorie, j’avais raison. Mais je ne me suis pas fait confiance.
Cette fois, je suis en colère. Dans
la voiture je prends un autre rendez-vous. Un mois plus tard… c’est la règle.
Pendant ce mois, j’étudie. Je ne lis pas!! J’étudie! Je dis à mon homme, que je
vais tellement connaitre le petit criss de livre par cœur que je vais pouvoir l’enseigner!
Je griffonne dedans, j’encercle, je fais tous les tests qu’on retrouve sur le
site de saaq. Bref. J’en rêve.
Tentative numéro 3. Je ne suis pas
nerveuse du tout. Je me répète sans cesse que ma vie n’est pas en danger. Je
survivrai si j’échoue encore. Ce n’est pas grave. J’ai goûté deux fois à l’échec
et la vie ne s’est pas arrêtée. Devant la jeune fille qui prend mes
informations pour ensuite m’assigner le poste que j’aurai, je dis à la blague :
C’est ma troisième fois, peux-tu me donner un examen facile pour une matante? Elle
n’a pas rit. Juste fait une grimace en remettant papiers, instructions et le
numéro du poste. Ouf! Quel manque de joie de vivre!
Je m’installe. Je regarde autour de
moi. Je m’étire. Je me sens bien. J’ai un certain lâcher prise que j’avais
négligé les premières fois. Je mets les écouteurs, règle le volume. Je
commence. Je comprends tout. Je connais tout. J’ai saisis !! Pouf! Vous avez réussi!
Aucune erreur! 100% Là je me reconnais! Je me lève sourire dans la face! J’ai
enfin mon permis 6R pour le circuit fermé! Youhou!
Arrive au cours numéro un. Toute
énervée. Nous sommes 4. Trois gars et moi. Une belle gang. On s’entend bien dès
le départ. J’enfourche la rebel. Facile! J’adore ça. Après quelques temps je maîtrise plus ou moins l’équilibre. Je n’étouffe pas la machine. Ok ça va. À
mi-cours l’instructeur nous assigne une autre monture. Je me retrouve avec une
ninja blanche. Oups! C’est pas pareil pantoute! Je suis couchée sur la moto. Je
n’aime pas ça du tout.
Elle étouffe sans cesse. Je manque
équilibre souvent. Pis Bang! Je tombe sous la moto. L’instructeur arrive en
trombe à mes côtés, je vais bien mais je hais cette moto. Pleine d’orgueil je l’enfourche
à nouveau. Beurk! J’étouffe sans arrêt! Je veux la rebel.
Cours deux. Je commence encore avec
la rebel. Une belle machine un peu maganée par les élèves au cours des dernières
années. Noire sans miroirs, le caoutchouc des pédales fendus. Mais elle, c’est
mon coup de cœur. Ensemble on file le parfait accord. Elle ronronne vieillit,
usée, pleine de kilométrage dans le corps. On se comprend, de rebelle à rebel! Je
réussis la maîtrise quasi-parfaite. Je me trouve douée!
Mi-cours arrive, l’instructeur nous
assigne d’autre moto. Esti! Encore une moto sport! Pas la même, une kawasaki
blanche et bleue. Position encore couchée. J’hais ça! C’est pas de mon âge que
je pense. J’étouffe, je ne maîtrise pas les vitesses, je manque d’équilibre je
ne ‘clush’ pas correctement! Esti! Je tombe encore! Je me relève en colère! Je
hais ce type de moto! Je veux une costum! L’instructeur, Ryan, il vient vers
moi. Je me suis fait mal au coude mais beaucoup moins que l’orgueil. Il me dit,
que ce n’est pas l’outil qui fait le travail, c’est l’ouvrier. C’est idiot de blâmer
l’instrument, quand c’est nous qui utilisons l’instrument. Je comprends. Il dit
qu’un motard doit savoir piloter toutes les motos, comme un conducteur sait
conduire tous les modèles de voiture. C’est du pareil au même. À la fin du
cours, je ne maîtrise toujours pas correctement la machine. Je dis à Ryan que
dorénavant je ne veux plus la rebel, c’est trop facile avec ce genre de moto,
je dois apprendre. J’ai cru percevoir dans son œil une petite lueur, il est on
ne plus d’accord.
Cours trois. J’arrive avec un certain
lâcher prise. Je croyais au début que se serait facile. Tsé j’apprends vite, j’ai
conduis plein d’engin dans ma vie, j’ai de l’expérience en conduite… mais le
facteur âge m’a joué un tour. Je suis quand même dans la quarantaine, je n’ai
donc plus l’agilité de ma jeune jeunesse.
Go sur la sportive blanche. Les gars
me donnent des trucs, que j’applique avec succès. Mais je n’ai toujours pas la
conduite adéquate. J’ai eu la pensée que peut être ce n’était pas pour moi, que
mon tour était passé, que je serais backseat c’est tout. Alors, j’ai lâcher
prise. Qu’il en soit comme il en soit! À partir de cet instant, je suis devenue
la moto et la moto est devenue moi. Bien que je chambranlais encore parfois, je
n’ai plus étouffé. Je ne suis pas tombée. Encouragée par mes trois ‘collègues’ je
réussis le cours 3 avec succès.
Cours quatre, le dernier en circuit
fermé. L’évaluation avant la route. Toujours sur des sportives, je fais ce que
Ryan me demande assez agilement. Je maîtrise la machine maintenant, peu importe
la monture, je la conduirai. Mes collègues sont fières de moi. Le verdict arrive.
Ryan, crayon et évaluation papier à la main, cigarette aux lèvres, nous
rencontre un par un pour nous donner son verdict. Les trois gars, passent sur
la route. Un gars qui s’est greffé à nous le cours 3, pour pratiquer encore, c’était
sa cinquième reprise, ça veut dire, 9 fois en circuit fermé sans être apte à aller
sur la route, il a échoué encore… Mon tour. Selon Ryan, j’étais sur la ligne.
Il me manque un petit quelque chose. Je le vois hésiter. Je le devance en lui
disant, qu’il serait mieux que je pratique encore. Il acquiesce sur le champ. Je
reviendrai donc en circuit fermé pour être plus parfaite. Après tout, il s’agit
de ma vie et celle des autres qui est en jeu. Vaut mieux être en parfait contrôle!
Je m’offre un cours semi privé avec
Ryan et… ha bien! Le gars qui n’arrive pas à quitter le circuit fermé! Deux
heures plus tard me voilà sur une grosse bécane rouge, (je ne connais pas tous
les types de moto encore) la 500 que j’utiliserai sur la route. Évidemment c’est
une sportive. Fais le tour, doucement elle est beaucoup plus puissante que les
autres que tu as pris jusqu’ici, me lance Ryan. Je l’enfourche. On fait
connaissance quelques instants. Je fais quelques tours avec elle… Wow!!!! Je
capote! Elle est toute douce, elle a des miroirs, elle ronronne en harmonie
avec mon souffle… My God je suis aux anges! Félicitation Mel, tu peux aller sur
la route. Youhou!!
Le cours théorique obligatoire avant
la route, je l’avais fait avant mon cours privé. J’étais donc prête pour la
route. Aussitôt chez moi, je boucle toutes mes sorties de route. C’est fou
comme j’ai hâte! Avant la première sortie, on fait quelques tours de piste,
histoire de voir si on est apte encore. Je suis avec le gars qui a repasser de
nombreuse fois son circuit fermé et un jeune couple. Ryan, refuse la route à la
jeune fille. Pas prête, elle met ses pieds au sol sans cesse. Elle pleure, la
pauvre… Son chum lui, passe. Nous partons. Ryan me place à la position 3. Je
trippe!! Liberté! Je salue mon premier motard! J’en suis émue…
La dernière sortie de route je me
retrouve seule avec Ryan. Ils ont mal fait ça au bureau! Faire sortir l’instructeur
payer temps double car c’est fête du canada, pour une seule personne… pas fort…
mais moi, ça fait mon affaire! J’écris à mon homme, viens rider avec nous, je
suis seule avec Ryan! Ça ne pouvait pas se terminer mieux! Il faisait beau,
chaud, je faisais la dernière ride en circuit fermé sur route, pis je la
partageais avec mon homme !! Vous dire combien j’étais dans le moment présent!
Wow! Ce fut une expérience extraordinaire!
L’ado qui rêvait d’une moto sport, se
retrouve quadragénaire qui rêve d’une custom. L’adulte que je suis aujourd’hui est à quelques jours d’obtenir son permis 6A. Je l’aurai fait, pis je l’aurai
fait jusqu’au bout! Non sans embûches, mais non moins victorieuse!
On se revoit sur les routes en quête
de Liberté!
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