Tout est dans la tête
Elle n’était qu’une toute petite
enfant quand j’ai su qu’elle était particulière. Son esprit était comme un
papillon, allant de pensée en pensée, ne s’attardant que peu de temps sur la
même activité, ou encore n’écoutant qu’avec attention qu’un brève instant les sermons
trop longs. Souvent dans la lune. Perdue dans ses pensées. Maladroite la
plupart du temps. Elle oubliait quelque chose ou perdait autre chose. Mon petit
papillon avait beaucoup de difficulté à rester concentré. Elle n’était pas
malheureuse du tout! Au contraire, elle a toujours été une petite douceur
ricaneuse. Elle aimait les gens, allait vers eux facilement. Dès son plus jeune
âge je me suis adapté à son ‘papillonnage’. Comme je savais qu’elle perdait la
moitié des informations et consignes que je lui donnais, je fragmentais mes
discours en la faisant répéter ce que je venais de lui dire. Ainsi, elle
restait concentrée et son cerveau enregistrait ce que j’attendais d’elle. Toutes
ces petites instructions qu’une mère donne à sa fille.
Elle grandit, alla à l’école,
obtenant des notes moyennes dans certaines matières, d’autres médiocres et
parfois d’excellentes dans ce qui la captivait. J’appris rapidement à faire des
notes que j’accrochais à des endroits où il lui serait facile de les apercevoir.
Les changeant de place chaque jour, autrement elles se fondent dans le décor, l’esprit
ne les voit plus, trop habitué. ‘Oublies pas ton lunch’ ‘aujourd’hui tu as de l’éducation
physique, prends tes vêtements’ Tout ce qui devait ne pas être oublié. Évidemment
elle rentrait à la maison ayant oublié sa boite a lunch, son manteau, ou même
de mettre ses bottes. Elle perdait constamment ses effets scolaires. Oubliait
de me remettre des documents à signer. Bref, un petit papillon!
Plus tard dans son adolescence,
avec tous les changements que les jeunes adultes en devenir vivent, elle
restait perdue dans la lune. Elle excellait dans les arts, le français et le théâtre.
Le reste n’ayant aucun intérêt à ses yeux, elle devait faire de grands efforts
pour parvenir à obtenir des notes de passage. Ce qui n’aide en rien l’envie d’aller
à l’école.
Rencontres avec les enseignants, la
direction, parfois même des éducateurs spécialisés. Moi, toujours de répéter la
même chose, ma fille est un papillon! Si vous savez capter son attention, vous
en tirerez le meilleur. Toujours mes mots n’avaient aucun impact. Un jour, on dû
la changer d’école. Coup du destin! Une petite école pour futurs décrocheurs.
Il n’y a qu’un nombre X d’élèves pouvant y être accueilli et une panoplie d’éducateurs
spécialisés, en psychologie, en relation humaine, en conseillers de toutes
sortes. Leur façon d’enseigner n’est pas la même que dans le système éducatif
normal. Ils y vont au rythme de l’élève, sans pression, avec des objectifs
simples et réalisables.
Je l’ai vu évoluer à travers cette
façon d’enseigner, magnifiquement. Elle a découvert des forces qu’elle avait, c’est
fait encourager et écouter. Toutes les écoles devraient avoir ce système d’enseignement!
Au rythme de la personne et non pas la personne qui doit s’adapter au rythme d’un
système.
Mais les rencontres n’ont pas
cessées pour autant. ‘Votre fille, madame, manque de concentration, de
persévérance. Pourtant elle a un potentiel énorme!’ Toujours les même réponses
que je leur donnais, ma fille, c’est un papillon! Un jour une de leur
spécialiste dont j’oublie en quoi, m’a entendu! Un papillon, dit-elle, mais
votre fille aurait-elle un tda? Ainsi, elle passa des tests sur cette étrange
particularité du cerveau. Verdict, mon papillon avait cette particularité. Son
père et moi, n’en n’avons pas été surpris du tout. Appelez ça comme vous
voulez, on le savait depuis toujours.
Un jour, elle est rentrée à la
maison me disant qu’elle voulait des pilules pour contrôler son tda. Ce à quoi
j’ai été formelle, il n’en n’ai pas question! Toute sa vie elle avait été un
petit papillon, on avait trouvé des alternatives s’adaptant à sa personnalité.
Ces pilules allaient changer qui elle est. Je refusai, a maintes reprises.
Jusqu’au jour où son éducateur me contacta pour m’en parler. Votre fille m’a
fait part du fait qu’elle désire être ‘médicamentée’ et vous vous objectez. Peut-être
cela lui ferait grand bien. Ça aide beaucoup les gens qui souffrent de tda… bla
bla bla… Je me suis dit d’abord ce n’est pas une souffrance, c’est une façon
singulière que son cerveau fonctionne. Ça ne l’empêche en rien, sauf d’apprendre
quelque chose qui ne l’intéresse pas. Puis ok, aussi de perdre ses choses.
Je crois que pour certaine personne
le tda doit être difficile à vivre. Que pour certaines personnes, la médication
est essentielle. Moi, je le refusais.
Un jour j’abdiquai. J’allais lui en
donner des pilules, mais j’allais les prendre dans une alternative ‘naturelle’.
Pas celles que tous ses amis prennent, non. J’allai voir le pharmacien, et lui
demandai des placébos. Bien oui! Des p’tites pilules de sucre. Je créai des
fiches expliquant le positif et le négatif, ce qu’il ne fallait pas consommer
avec ce médicament. Bref, tout pour que le médicament soit véridique aux yeux
de ma fille.
Elle les prit, croyant être des produits
naturels, mais ayant le même effet que ceux de son entourage qui avaient eux
aussi un tda. Ses notes se sont mises à grimper. Sa concentration s’est
aiguisée. Et elle est restée la même personne pétillante, ricaneuse,
bougonneuse, papillon, maladroite, lunatique.
Chaque fois que j’allais ‘renouveler’
ses médicaments le pharmacien me demandait si ça fonctionnait vraiment. Je lui
répondais toujours, l’esprit a un pouvoir plus grand qu’on lui accorde. Tout
part de l’intérieur. Si l’esprit croit quelque chose, cette chose existe.
Ma mère me répétait sans cesse :
c’est dans ta tête. J’ignore si elle savait combien elle avait raison. Cette
petite phrase a fait de moi, celle que je suis. J’ai fait nombre de soupes
magiques, en saupoudrant du sucre a décoré de couleur, devant mes enfants qui
croyaient que c’était de la magie. S’en était! Puisqu’ils croyaient que la
soupe allait les guérir, c’est ce que ça faisait! L’esprit est puissant!
Je raconte cette petite tranche de
vie, non pas pour dire que les personnes étant des papillons devraient prendre
des placébos. Je ne suis nullement médecin. Je ne connais du tda, que ce que j’ai
vécu avec ma fille. Je te raconte cette partie de ma vie, pour te rappeler que
tout est déjà en toi. Que tu as le pouvoir sur la matière, les émotions, la façon
de voir la vie, les événements, les obstacles… Tout est ce que toi tu décides
que ce soit. Rien n’est extérieur à ce que tu es à l’intérieur.
Qu’il s’agisse de colère, de
rancune, de tristesse, de maladie, de confiance en soi… tout débute d’abord et
avant tout dans l’esprit. On ne donne pas la juste valeur à notre pouvoir
intérieur. Nous sommes plus puissants et capables que nous admettons. Tout part
de soi. Tout est dans la tête.
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